Me voici donc en confinement. Moi, Gueularde, qui fait systématiquement respecter un espace minimum de deux mètres à chaque individu souhaitant interagir. Moi, qui n’ai volontairement aucune vie sociale. Moi, qui repousse par la force de ma volonté, le moindre microbe. Je suis en confinement.

je sais que ma sensibilité ne me permettra pas de tenir enfermée dans la ferme familiale. Les voisins ont cette horrible habitude de venir prendre de mes nouvelles. Les connaissant, ils seraient fichus de venir m’apporter leurs légumes bio, cuisinés en salade avec filet d’huile de sésame. Confinement d’accord, mais je choisis le lieu! Ce sera à l’école, dans la salle de la photocopieuse!

Mes valises sont prêtes, oh, pas grand chose, le minium, de quoi me recentrer et me reconnecter au moi intérieur que le quotidien à cent à l’heure m’a fait oublier. Ce confinement sera pour moi un voyage vers le vrai. Non, un voyage vers le Vrai, avec une majuscule. L’émotion me gagne lorsque je tourne la clé dans la serrure. Te reverrai-je, toi, mon toit? Je fais un doigt d’honneur à ce c*#%onnard de voisin qui s’approche déjà avec son sac en toile cousu main contentant graines de chia et spiruline. Mais accepte tout de même son aide pour charger les 5 valises dans le coffre de ma Twingo.

La route est déserte. Je klaxonne tout de même à chaque feu, par habitude. En plus ça fait suer les gens qui prennent l’apéro sur leur balcon!

Me voici à l’école. Le silence, le vide. Ici traîne encore une corde à sauter, qu’un élève a oublié de ranger. Je la prends dans les mains et regarde cet objet enfantin, métaphore d’insouciance et de gaité. Un spasme me tord l’estomac. Je sais à qui elle appartient. Le petit y tient beaucoup. Si je prends toutes les mesures de précaution, que je la désinfecte soigneusement, je pourrais certainement… m’en faire une corde à linge.

Me voici dans les locaux. Je pousse les tables de réunion et monte mon lit de camp. Sur le massicot j’installe mon coin cuisine, la lame, peu aiguisée certes, pourra toujours me servir à couper les pizzas. La plastifieuse est installée à mes pieds, puissance Max (plastification du 120um) une bouillotte Diy comme disent les collègues. La chaleur gagne mes pieds, c’est bon.

Me voici enfin installée. Oh ce n’est pas très confortable, je me sens un peu oppressée, mais s’il faut souffrir pour sa patrie, je suis prête à prendre ma part de douleur. Et puis je sais où Christine, ma collègue de PS cache ses chocolats!

Je tiendrai ce journal de confinement aussi régulièrement que possible, l’équipement informatique de la salle me permettra de le publier pour que chacun puisse vivre avec moi ces heures sombres. Je maîtrise assez bien maintenant Fenêtre 95. (Oui, en France on parle Français!) Et n’oublions pas que je dois assurer la continuité pédagogique de mes élèves. Mais pour le moment, je me repose. Toutes ces émotions m’ont affaiblie. Par conscience citoyenne, j’irai contrôler avec le thermomètre de l’école ma température. C’est rigolo, au bout de 18 min il change de couleur!

Si vous souhaitez partager vos anecdotes de confinement, allez le faire ailleurs, ce n’est pas un espace participatif ici!

Allez, tchao mes p’tits poulets!